Introduction à la stratégieLE MONDE ECONOMIE 19 Janvier 1999 / Supplément (Extrait) Questions-réponses 1/ Quels sont les principaux acteurs du conseil en stratégie ? Au cœur du système, on trouve des cabinets anglo-saxons dont le numéro un mondial est McKinsey, fondé en 1926. Viennent ensuite ATKearney, le Boston Consulting Group (BCG), Bain & Company, Arthur D. Little, Mercer Management Consulting, etc. Le créneau est aujourd'hui aussi exploité par d'autres structures, comme Andersen Consulting, à l'origine spécialisé dans le changement organisationnel. Pendant la première guerre mondiale, James O. McKinsey, professeur de comptabilité à l'université de Chicago, devient officier, chargé d'organiser - et d'améliorer - la logistique des sources d'approvisionnement de l'armée américaine. Cette expérience l'incitera à créer, par la suite, un cabinet de conseil. Les universitaires jouent également un rôle important. Quelques-uns se contentent d'enseigner la stratégie et d'en faire un sujet de recherche. Ce sont plutôt des exceptions. La grande majorité sont à la fois professeurs et consultants. Certains vont même jusqu'à créer leur propre structure, à l'instar de Michael Porter, enseignant à la Harvard Business School - dont le livre Choix stratégiques et concurrence, publié en 1980, lancera une école de pensée nouvelle -, qui fondera le cabinet Monitor. Il existe enfin des francs-tireurs, des "gourous", qui conseillent en direct des présidents d'entreprise, et dont l'influence n'est pas à négliger. 2/ Qui sont les " big five " ? Ce sont les cinq géants de l'audit : PricewaterhouseCoopers, Andersen Worldwide (Arthur Andersen et Andersen Consulting), Ernst & Young, KPMG, et Deloitte Touche Tohmatsu. Cantonnés à l'origine dans les métiers du chiffre (expertise comptable, audit), ils interviennent aujourd'hui dans les domaines de la fiscalité et du droit, mais aussi dans le conseil qui est l'activité où ils réalisent leurs meilleures progressions de chiffre d'affaires (avec des hausses dépassant 30 %). Les " big five " sont ainsi devenus des concurrents pour les cabinets de stratégie. Mais ces derniers empiètent aussi de plus en plus sur certains domaines des " big five ". En réalité, le marché du conseil en stratégie pure n'existe plus comme tel. 3/ A quand remonte l'analyse stratégique ? L'école la plus ancienne remonte à plus de deux mille ans. Les préceptes de L'Art de la guerre, écrit par Sunzi environ 400 ans avant J.-C., restent d'actualité et continuent à être enseignés. Le stratège chinois insistait sur la nécessité d'obtenir des renseignements sur l'ennemi et le lieu de la bataille, comme le font aujourd'hui les experts qui privilégient l'étude du secteur dans lequel une entreprise évolue. La stratégie d'entreprise devient une véritable discipline universitaire après la seconde guerre mondiale. Le " la " est donné sur les bancs des universités américaines, plus spécifiquement à la Harvard Business School qui joue, encore aujourd'hui, un rôle majeur dans ce domaine. 4/ Existe-t-il différents courants de pensée ? Oui, car, depuis cinquante ans, l'histoire a prouvé qu'il n'existait pas de vérité stratégique gravée dans le marbre. Les paradigmes élaborés soit par des universitaires, soit par des cabinets de conseil en stratégie sont tous marqués dans le temps. Un modèle chasse l'autre. Dans les années 50, par exemple, une approche, dite de l'analyse en forces et faiblesses, domine. Les entreprises sont invitées à se positionner par rapport à leurs concurrents et donc à renforcer leurs atouts. La démarche montrera vite ses limites. Dans sa version initiale, elle n'impliquait pas de rassembler des données de parts de marché ou de besoins de clients, donc d'avoir un regard sur l'extérieur. Dans le milieu des années 60, un autre modèle, dont la paternité revient au Boston Consulting Group, se répand : celui de la courbe d'expérience. Son apport ? La mise en évidence que, dans certains secteurs, le prix de revient diminue à chaque fois que la production cumulée s'accroît. A technologie constante, c'est le résultat de l'effet d'échelle et de l'effet d'apprentissage. Le concept pousse à la production de masse et à la concentration. Intéressant... Mais pas suffisant. Henry Ford aurait pu en témoigner. Au début du siècle, le constructeur américain afficha d'excellentes performances sans qu'aucun de ses concurrents puisse rivaliser avec lui, jusqu'à ce que General Motors lance une gamme aux couleurs et aux formes variées. Les clients de Ford qui ne connaissaient que le noir de son modèle T réclamèrent d'autres choix possibles. Ford mit plus de deux ans à sortir un deuxième modèle, tant ses modes de production étaient adaptés au premier. Au cours des ans, la stratégie d'entreprise a donc évolué. Les méthodologies sont devenues plus complexes. Les experts répertorient entre neuf et dix générations successives de schémas dont les mérites furent à chaque fois reconnus puis contestés. |
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